Arrivé en 1954, Naïm Kattan a vite adopté le Québec, sa culture et ses acteurs, dont les écrivains et écrivaines qu’il a côtoyés; par exemple, Jean Éthier-Blais, Nicole Brossard, Jacques Godbout, Gaston Miron et Jean-Guy Pilon. Au cours de sa carrière, cet intellectuel a collaboré à nombre de périodiques du Canada, de l’Europe et du Proche-Orient, dont Canadian Literature (Vancouver), Tamarack Review (Toronto), Le Devoir et Liberté (Montréal), de même que Les Lettres nouvelles, La Nouvelle Revue française et La Quinzaine littéraire (Paris). Il est l’auteur d’une œuvre littéraire importante qui met l’accent sur la figure de l’écrivain immigrant. Dans les dernières années de sa vie, il a écrit, tous les jours, et ce, presque jusqu’à la toute fin, des textes de réflexion sur les grands thèmes qui l’ont toujours occupé : la culture, le désir, l’amour et le pouvoir. En outre, dès 1954, cet homme de dialogue interculturel a été la cheville ouvrière du Cercle juif de langue française. En 1955, le maire de Montréal, Jean Drapeau, a par ailleurs cité le Cercle comme exemple à suivre pour la métropole québécoise.
M. Kattan vit le jour, en 1928, à Bagdad, la capitale de l’Irak. Il a fréquenté la faculté de droit de l’Université de Bagdad, de 1945 à 1947, puis, comme boursier du gouvernement français, la faculté de lettres de Sorbonne Université, de 1947 à 1951.
En 1954, après avoir multiplié les contacts avec de grands auteurs français et rencontré le journaliste québécois Jean-Marc Léger, il abandonna la vie française pour immigrer au Canada. À Montréal, il a vu le potentiel du Cercle juif de langue française, un comité créé par le dirigeant principal du Congrès juif canadien. La même année, il a fondé le Bulletin du Cercle juif, un organe d’information du Cercle juif de langue française, dont il a été le rédacteur en chef jusqu’en 1967. Au cours de cette période, il était aussi secrétaire du Cercle. Grâce au travail d’animation de M. Kattan, le Cercle est devenu un carrefour d’opinions et de rencontres majeures, avec la tenue de conférences données par des personnalités montantes ou de premier plan telles que Gérard Filion, Jean-Louis Gagnon et René Lévesque.
En 1957, M. Kattan fut invité à collaborer au journal Le Devoir. Après cinq ans, il est devenu critique littéraire du journal, et ce, pour une longue période, soit de 1962 à 2015.
En 1961, il devint chroniqueur dans la section politique internationale du quotidien montréalais Le Nouveau Journal, né d’une scission à La Presse. En 1962, il fut chargé de cours à l’Université Laval. De 1965 à 1967, il était rédacteur à la Commission d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme.
En 1967, il s’installa en Ontario et intégra, à Ottawa, comme responsable des lettres et de l’édition, le personnel d’encadrement du Conseil des arts du Canada. Il y a monté le Service des lettres et de l’édition, dont il a été le premier chef. Puis, en 1989, il devint directeur associé. En 1991, il prit sa retraite pour se concentrer sur l’écriture ainsi que sur la présentation de conférences au Canada et à l’étranger. Il fut donc écrivain en résidence au département d’études littéraires de l’Université du Québec à Montréal, avant d’être fait, en 1992, professeur associé de ce même département, un poste qu’il a occupé jusqu’en 2014.
De 1993 à 2001, il faisait partie du Conseil des arts de la communauté urbaine de Montréal. De 1994 à 1996, il était président de l’organisation du Grand Prix du livre de Montréal. À partir de 2001, et ce, pendant neuf ans, il assurait la direction du trimestriel Les écrits, la revue de l’Académie des lettres du Québec, qui lui a rendu un riche hommage dans son numéro de novembre 2012. Il quitta le comité de rédaction de la revue en 2016.
Quoi qu’il en soit, si l’on considère l’ensemble de sa carrière, M. Kattan s’est fait connaître avant tout comme écrivain intellectuel. On lui doit une trentaine de publications littéraires en français, soit sa deuxième langue. Il a publié une quinzaine de romans qui abordent l’exil, l’appartenance, la nostalgie des origines et les différences culturelles. Il a aussi produit cinq essais et six nouvelles.
En 2007, M. Kattan se vit décerner le prix Hervé-Deluen, alors attribué pour la première fois par l’Académie française, pour avoir assuré la défense et l’illustration du français comme langue internationale.
En 2019, ce chevalier de la Légion d’honneur de France décida de retourner à Paris, où il a habité jusqu’à sa mort.
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